Une parole qui s'entend encore par delà les océans, les miles et les ans:

Extrait d'un cadeau de Noêl, de ceux qui font réfléchir, quant on a trop sommeillé à l'école , et qu'arrivant la quarantaine, on regarde autour de soi, et de plus jeunes et de plus vieux:

Hommes et femmes ne sont que des acteurs;
Ils ont leurs sorties comme leurs entrées,
Et chacun dans sa vie joue bien des rôles.
Ses actes font sept âges. D'abord l'enfantelet
Qui vagit et vômit au bras de sa nourrice,
Puis l'écolier grognon, avec son sac, traînant comme limace
A regret vers l'école. Et puis c'est l'amoureux
Aux soupirs de forge, faisant une triste ballade
Sur le sourcil de sa maîtresse. Puis un soldat
Plein d'étranges jurons, moustachu comme un léopard,
Jaloux de son honneur, vif, prompt à la querelle
Cherchant cette chimère, la gloire
Jusque dans la gueule du canon. Et puis le juge,
Belle panse arrondie, de bon chapon doublée,
L'oeil sévère et la barbe taillé en forme,
Plein de sages dictons et de banales sentences.
Tel il joue son rôle. Le sixième âge fait passer
Au maigre Cassandre en pantoufles
Les lunettes au nez, l'escarcelle au côté,
Ses chausses de jeune homme, ménagées, trop larges d'un monde
Pour ses jambes ratatinées. Sa grosse voix virile
Retourne au soprano flûté de l'enfant
et se fait sifflante. Dernière scène de toutes,
finissant cette étrange histoire pleine d'aventures,
C'est la second enfance et le simple oubli,
Sans dents, sans yeux, sans goût, sans nulle chose.

c'est extrait de: Bréviaire de littérature pour les vivants publié aux éditions Bréal où l'on trouve aussi l'Anti manuel d'économie.

Pour tout savoir sur l'auteur de ce bréviaire :Pierre Bergounioux

et pour tout savoir sur William S.: William Shakespeare.